Intelligence artificielle et dermatologie : analyse scientifique d’une collaboration en évolution
Entretien avec le Dr Véronique Gassia, dermatologue esthétique à Toulouse
Et si l'intelligence artificielle pouvait lire sur notre peau ce que nous ne voyons pas ?
L’intégration de l’intelligence artificielle en dermatologie marque une étape majeure dans l’évolution des sciences cutanées. Grâce à des algorithmes capables d’analyser des images médicales et de repérer des patterns invisibles à l’œil nu, l’IA ouvre de nouvelles perspectives diagnostiques.
Le Dr Véronique Gassia nous livre ici une analyse éclairée de ce que représente réellement l’IA dans sa pratique de la médecine esthétique.
IA et pratique dermatologique : un outil d’aide au diagnostic en pleine expansion
L’IA s’est intégrée simultanément à la pratique professionnelle des médecins et aux usages quotidiens des patients, qui consultent désormais spontanément des outils de type chatGPT pour obtenir des informations médicales.
Selon le Dr Gassia, l’IA constitue « un outil puissant », notamment grâce à l’analyse automatisée d’images dermatologiques, utile pour l’examen des lésions pigmentaires, des grains de beauté ou encore des altérations morphologiques du visage.
Ces technologies peuvent accélérer le triage, optimiser la surveillance et renforcer la sécurité du patient.
Les limites technologiques : l’IA ne remplace pas l’interprétation médicale
Malgré sa sophistication, l’IA n’intègre pas la vision holistique nécessaire à un diagnostic complet. Le Dr Gassia insiste sur l’importance de l’expertise clinique et de la prise en compte de paramètres individuels tels que :
- le phototype cutané,
- les antécédents médicaux,
- l’histoire dermatologique,
- la dimension psychologique et esthétique des attentes du patient.
L’IA repose exclusivement sur les données qui lui sont fournies. Elle peut donc ignorer des nuances essentielles dans l’évaluation d’une peau, d’une lésion ou d’un projet esthétique.
Dermatologie et médecine esthétique : un domaine où la subjectivité humaine reste essentielle
Entre les données calculées par l'intelligence artificielle et le diagnostic du dermatologue, l'équilibre est fragile. La machine calcule, le médecin écoute son patient.
En dermatologie esthétique, l’IA peut analyser des proportions, mesurer des volumes, évaluer des asymétries. Mais elle demeure focalisée sur une lecture strictement morphologique du visage.
Le Dr Gassia rappelle que chaque visage porte une identité, un caractère et une authenticité que seul un praticien expérimenté est capable d’appréhender.
La décision thérapeutique doit donc reposer sur un compromis entre données objectives (apportées par l’IA) et appréciation sémiologique et artistique (propre au médecin).
Vers une synergie raisonnée entre technologie et expertise humaine
La peau n'est pas un calcul, le visage n'est pas une donnée, la beauté reste humaine.
Pour le Dr Gassia, l’avenir passe par une utilisation raisonnée de l’IA qui permettra de :
- renforcer l’analyse,
- fiabiliser les décisions,
- libérer du temps pour une relation patient-médecin plus qualitative.
Elle anticipe une évolution positive, dans laquelle l’IA deviendra un outil d’aide à la décision, mais jamais un substitut à l’examen clinique, à l’intuition médicale ou à l’expérience accumulée au fil des années.
Conclusion
L’intégration de l’intelligence artificielle en dermatologie représente une avancée majeure pour l’imagerie cutanée, la prévention et le suivi des patients. Cependant, malgré la précision croissante des algorithmes, l’expertise humaine reste centrale.
La dermatologie demeure une discipline où chaque peau raconte une histoire et où la technologie, aussi performante soit-elle, ne peut remplacer la relation humaine qui fonde l’acte médical.




